"La Rochelle sous le charme d’une Amoureuse"

Publié le par Jeremusic

http://www.la-croix.com/var/bayard/storage/images/lacroix/culture-loisirs/culture/musique/la-rochelle-sous-le-charme-d-une-amoureuse-_eg_-2012-07-15-831435/26713294-2-fre-FR/La-Rochelle-sous-le-charme-d-une-Amoureuse_article_main.jpg photo // SADAKA EDMOND / SIPA

 

Jeanne Cherhal a rejoué le premier album de Véronique Sanson aux Francofolies

On en retient, vendredi 13 juillet, la performance d’une grande Jeanne Cherhal, sur les traces de Véronique Sanson.

La Rochelle n’aime pas la pluie, ni le vent qui a obligé vendredi les Francofolies à annuler une soirée de concerts en plein air. Les plus chanceux étaient au théâtre de La Coursive, tout à leur bonheur d’applaudir deux créations revisitant des chansons du passé. En fin de soirée, « Crouners » donnait l’occasion à cinq valeurs montantes de la chanson (Thomas Dutronc, Alexis HK, Tété, Anis et Rover), accompagnés d’un big band avec trompettes, trombones, saxos, clarinettes – une limousine ! – de se confronter au répertoire de velours de Dean Martin ou Frank Sinatra… Mais n’est pas Yves Montand qui veut. Hormis Tété, charmeur et cabot, vêtu de blanc des souliers au chapeau, le spectacle fut archi-dominé… par l’orchestre. Dommage.

La Rochelle n’aime pas la pluie, sauf si elle symbolise la mélancolie des notes et des mots, sanglots vibrants célébrant un amour rayonnant, fulgurant. Alors naît un arc-en-ciel de musique. À Jeanne Cherhal le privilège d’avoir dissipé la grisaille, elle qui s’était donnée pour défi l’an passé de redonner vie à Amoureuse , premier album de Véronique Sanson sorti en mars 1972 (1). Réalisé par Michel Berger, avec qui la chanteuse de 22 ans vivait alors une histoire d’amour, le disque révéla sa sensibilité extrême, les vibratos de sa voix, son talent d’auteur-compositeur hors norme.

Une vie d’Amoureuse déclinée en « charade  »

Sur scène, Jeanne Cherhal interprète Amoureuse  avec émotion, simplicité, comme elle l’avait fait déjà le 20 mars, au « 104 », à Paris, en présence de Véronique Sanson. À La Rochelle, la performance, mieux maîtrisée, permet au public d’écouter in extenso ce disque qui marqua l’histoire de la chanson rock, de s’y plonger, de l’entendre pour ce qu’il est : une œuvre qui rayonne, et pas juste une succession de chansons. Les douze titres composés « à quatre mains et deux cœurs  », comme l’écrit Yves Bigot dans sa biographie de Michel Berger (2), forment un ensemble fusionnel, alternant emportements (sur le presque inchantable Vert vert vert ) et apaisements (sur Mariavah ). 

A la fièvre d’Amoureuse  (« une nuit je m’endors avec lui  ») répond le désenchantement de Tout est cassé, tout est mort . À la confession de L’irréparable  («… c’est aimer l’amour, c’est donner une partie de sa vie  »), fait écho la confidence de Louis  (« tu attends tout d’elle, comme toujours  »)… Au Besoin de personne  succède celui d’un ailleurs partagé (Bahia ). Aux braises de C’est le moment  (« Tu m’as appris à être amoureuse, depuis je suis peureuse, je ne pense qu’à toi  »), enfin, les cendres de Dis-lui de revenir . Une vie d’Amoureuse déclinée en « charade  », titre du dernier album de Jeanne Cherhal, en 2010.

Vendredi soir, sur scène, celle-ci a posé le 33 tours de sa belle devancière sur un tourne-disque, a actionné le bras, puis s’est dirigée vers le piano, tandis que la salle s’emplissait du frottement de la tête de lecture sur le microsillon, avant le premier morceau. Elle a renouvelé l’opération au bout de la face, pour retourner le disque. Puis à la fin, pour le remettre dans sa pochette. Accompagnée de trois musiciens, elle aura chanté dans l’ordre les douze plages, sans temps mort, fidèle à Véronique Sanson sans chercher à l’imiter. Amoureuse.

(1) Warner Music le réédite en 2012, assorti de bonus.

(2) « Quelque chose en nous de Michel Berger », Éd. Don Quichotte, 2012, 324 p., 19,90 € (lire La Croix du 28 juin 2012).

JEAN-YVES DANA, à La Rochelle

 

 

 

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